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En quelques années seulement, Morgan Ricci et son frère Esteban ont propulsé leur marque de rhums, Famille Ricci, au sommet de l’excellence mondiale. Partis d’un garage familial à Mougins où ils ont assemblé, élevé et embouteillé leurs propres rhums, ils ont su imposer leur vision audacieuse, multipliant les distinctions et les projets ambitieux. Aujourd’hui, sous le nom de Ricci’Spirits, ils s’ouvrent au public avec une boutique, des visites, des ateliers et des formations. Ils étendent également leur expertise à d’autres spiritueux et s’apprêtent à marquer l’histoire avec la production du premier whisky de la Côte d’Azur. Retour sur une aventure hors du commun avec son fondateur associé Morgan Ricci.

Morgan, comment vous êtes-vous lancé dans l’activité d’embouteilleur de rhum ?

C’est une passion transmise par mon père. Il n’était pas dans la production d’alcool, mais il possédait une affaire sur Cannes, La Chunga, où il y avait des spiritueux de qualité. J’ai grandi dans cet univers, à goûter des produits d’exception. Je pensais d’ailleurs reprendre l’établissement une fois devenu adulte. Quand mon père a finalement revendu La Chunga, je me suis demandé ce que j’allais faire. J’aimais les vins, les champagnes et les spiritueux, alors j’ai commencé en tant que commercial pour différentes maisons pendant six ans. Puis, je suis devenu technico-commercial et j’ai approfondi mes connaissances sur la production. Après cela, j’ai tenu une cave à Antibes avec mon ex-compagne. C’est là que j’ai découvert de nombreux types de rhums et rencontré des producteurs passionnants.

C’est à ce moment-là que vous avez eu le déclic ?

Exactement. J’avais toujours gardé dans un coin de ma tête l’idée de produire moi-même. Mon alcool de cœur était le Cognac, pour son élégance et sa complexité. Mais la production de Cognac est très réglementée et cela ne me correspondait pas, car je voulais innover. Je me suis tourné vers le rhum, j’allais devenir embouteilleur, assembler des jus du monde entier, et créer mes propres cuvées. Pendant quatre ans, j’ai voyagé et visité de nombreuses distilleries pour apprendre au maximum. J’ai suivi des formations à l’École des spiritueux de Cognac et lu énormément, alors que je n’avais jamais lu un livre de ma vie, sauf les Harry Potter ! J’ai expérimenté chez moi, testé des vieillissements avec différents bois, pour me forger ma propre méthode.

Pourquoi embouteilleur de rhum et non distillateur ?

D’abord pour une question pratique : investir dans une distillerie demande un budget énorme et des connaissances techniques spécifiques qui n’étaient pas mon point fort. Ensuite, cela me permettait de voyager, de sélectionner des rhums de qualité. L’assemblage est essentiel : le vieillissement représente 50 à 70 % de l’aromatique finale d’un vieux spiritueux.

Quand a commencé précisément l’aventure de Rhum Ricci ?

En 2019, à Mougins. Du haut de mes 29 ans, je suis arrivé avec une philosophie nouvelle : vieillissement dans différents types de bois et assemblages qualitatifs. Dans un milieu conservateur, cela a surpris. Nous avons commencé avec quatre cuvées, des rhums accessibles à 40 degrés. En 2020, nous avons produit et vendu 5000 bouteilles, alors que j’en avais prévu 2000.

Pourquoi avoir lancé votre activité à Mougins ?

Je suis un enfant du cru, très attaché à son territoire. J’ai grandi sur la commune, chemin du Fassum et aussi chez ma grand-mère, chemin de Pibonson. C’est d’ailleurs dans son garage et sa maison que nous avons installé nos premiers fûts et débuté l’aventure ! J’ai très vite été rejoint par ma mon petit frère Esteban qui est devenu mon associé. C’est une histoire familiale. D’ailleurs, la bouteille de notre première cuvée Dynasty qui réunit toutes les familles de rhums du monde à l’image d’une grande famille unie, est à l’effigie de celui qui m’a élevé, Roger Ferrer, à qui je voulais rendre hommage.

En 2021, vous obtenez le titre de meilleur rhum du monde…

C’était le plus grand concours exclusivement dédié au rhum jamais organisé. Le jury était composé d’experts internationaux et la dégustation s’étalait sur un mois, avec des fiches détaillées pour chaque produit. Un jour, je reçois un appel du président du concours. Il me dit qu’on a obtenu six médailles, dont deux de finalistes. Puis, il m’annonce que nous avons remporté le titre de meilleur rhum du monde toutes catégories confondues avec L’OVNI numéro 2 ! C’était un assemblage audacieux d’un rhum exceptionnel d’une distillerie fermée avec un autre issu d’une production totalement différente. Au départ, on m’a dit que c’était « insultant » de faire ça. Mais c’est justement avec ce rhum que nous avons gagné !

Qu’avez-vous ressenti ?

En apprenant cette nouvelle, j’ai craqué et fondu en larmes. Toute la pression et les années de travail ont lâché d’un coup. Très vite, ce prix a changé notre trajectoire. Les sceptiques et les critiques ont été bluffés, le regard des professionnels a vraiment changé. L’impact a été énorme, les revendeurs sont venus naturellement à nous. Nous avons environ 500 cavistes en France qui distribuent nos produits… À partir de 2022, nous avons également commencé à exporter, principalement en Europe et en Asie, et les volumes sont passés à 30 000 bouteilles produites par an.

Vous avez poursuivi votre croissance

En 2023, nous avons investi dans de nouvelles machines, comme l’embouteilleuse automatique, pour faire face à la demande grandissante. Nous avons augmenté notre capacité à 80 000 bouteilles pour 2024. Nous avons multiplié les récompenses. Nous venons de remporter le titre de meilleur embouteilleur indépendant du monde 2024 devant plus de 500 participants sur la plus grande plate-forme mondiale dédiée au rhum, l’application RumX.

Vous venez également d’emménager dans de nouveaux locaux, tout en prenant le nom de Ricci’ Spirits. Parlez-nous de vos projets…

Nous nous sommes installés dans de nouveaux locaux de 500 m², au cœur d’Actipark. Tout en poursuivant bien sûr l’embouteillage de rhums, nous allons élargir notre gamme de produits, et devenir experts en spiritueux au sens large, cette fois-ci avec la distillation directe de spiritueux tels que le whisky, le gin, le pastis, le limoncello, ainsi que des liqueurs à base de fruits et de plantes locales. D’où le nom de Ricci’Spirits. Pour cela, nous avons acquis un alambic parmi les plus performants en Europe. Il permet d’obtenir des alcools très intenses et aromatiques !

Ce sera le premier whisky produit sur la Côte d’Azur !

Tout à fait ! Il faudra cependant un peu de patience. La législation impose en effet un minimum de vieillissement et trois années sont nécessaires avant que l’alcool produit ne devienne officiellement du whisky.

Autre nouveauté : vous pouvez désormais accueillir du public …

Oui, nous avons une boutique où l’on vend directement nos produits. Les clients peuvent ainsi déguster avant d’acheter, sur le lieu même de la production.

Il aura également des visites et des ateliers?

Tout à fait. Nous allons proposer des visites guidées de la distillerie à partir d’avril, tous les mercredis et samedis avec trois créneaux horaires : 15h, 16h et 17h. Les visites se feront sur réservation, soit sur place, soit via notre site internet. Nous proposerons également différents types d’ateliers. Par exemple, les ateliers de création de rhum où les participants pourront composer leur propre assemblage de rhums. Ils repartiront avec leur propre bouteille. Nous proposerons aussi des ateliers sur l’assemblage de gin, où chacun pourra créer sa recette avec des épices et des fruits. Enfin, nous organiserons des soirées de dégustation, des masterclass et des conférences sur des sujets variés.

Vous envisagez aussi des formations pour les professionnels…

Nous proposerons en effet des formations pour les professionnels du secteur, comme les cavistes et les commerciaux. Ces cours seront dédiées à la maîtrise des spiritueux et à l’art de la dégustation. Très peu d’établissements délivrent ce type d’enseignements, il y a un vrai manque.

Vous avez également un projet ambitieux de domaine multi-activités à Mougins. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Oui, à plus ou moins long terme, nous espérons créer ici à Mougins un domaine qui combine production, musée, et activités de loisirs. Il y aurait un espace immersif avec des projections 3D, un toit-terrasse avec tapas, et même un jardin botanique. Ce serait un lieu de vie pour les habitants et les touristes ainsi qu’un véritable atout pour la valorisation de notre territoire mouginois. À suivre…

Savoir + : https://www.famillericci.com/ 

609 Route de la Roquette, Mougins

Tel : 04 83 93 83 65

 

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